Doux frémissement des pistons.
Depuis longtemps le professeur frétillait d'impatience à la pensée d'ouvrir le moteur. Il avait bien du se faire une raison mais cependant la grande manœuvre était prévue ce dimanche 4 mars. L'équipe des artificiers se composait de Hugo, de Marcel et d'André.
André travaille à la culasse aidé de Marcel. Hugo tombe la tringle de commande du régulateur, le carter de frein gauche, la sangle (beaucoup d'humidité, rouillée, hors service). Côté moteur, pour son âge, l'état général n'est pas trop mal. Les culbuteurs sont tous là, aucun n'a fait la culbute mais l'huile d'autrefois est figée, c'est une pâte noire, visqueuse et très salissante. Rien n'est bloqué à ce stade. Les goujons de la culasse sont dévissés sans difficultés. Enfin, s'écrie André, nous y voilà. A deux, la grande culasse est enlevée et les pistons tant attendus apparaissent. Pas vilains du tout, ils baignent dans du dégrippant depuis quelques jours, ce sont ceux du milieu qui semblent le plus emprisonnés.
Il faut nettoyer les cylindres. Les parties visibles ne sont pas altérées outre mesure, les têtes de pistons sont belles. Côté culasse il y a des débris de particules dans les chambres deux et trois, les sièges de soupapes ne sont pas corrodés à première vue.
Opération tapage.
Après avoir noyé de dégrippant tous les cylindres, le tapage au moyen d'une belle cale cylindrique en frêne de diamètre légèrement inférieur à l'alésage peut commencer. Aucune brutalité n'est employée. Hugo exerce une forte pression sur la manivelle.
Au bout de plusieurs manœuvres de ce genre, répétées gentiment, d'un piston à l'autre, il y a un tout petit mouvement bien visible sur le repère de la poulie du vilebrequin. Marche avant, marche arrière, les degrés augmentent. Hugo et Cyrrhus font levier sur la manivelle avec une barre à mine. Les chemises sont passées au papier verre très fin et nourries abondamment de WD 40. Il va falloir prendre des actions chez WD Company ! Le mouvement s'amplifie à l'aide de la clé à griffe placée à la poulie. Peu après 18 heures le vilebrequin fait un tour complet, il y a un léger point dur mais cette étape décisive est remportée. L'équipe est heureuse et croit entendre des soupirs d'aise du H.
Mardi 6 mars. Mise bas.
Visite des entrailles du moteur. Le carter moteur est vite déposé ainsi que la pompe à huile. Les boulons de tête de bielles fort bien serrés sont défaits. Chaque piston monte très facilement. En fait ce n'est pas une mise bas puisqu'ils sortent tous par le haut mais ils sont tous au terme de leur souffrance! Tous les segments sont là, les coussinets sont beaux, la chemise N° 2 est légèrement piquée vers le haut, c'est bien le piston N° 3 qui était récalcitrant.
Décollage.
A petits coups de cales en bois avec injection généreuse de dégrippant, les segments reprennent vie et se décollent sauf celui de feu du piston N° 3. André fin manœuvrier s'emploie a cette délicate opération avec un soin jaloux. Hélas “patractac” , en fin d'après midi cette noble et indispensable pièce se brise en trois morceaux. Consternation!
Dimanche 11 mars.
Le moral des troupes n'est en rien affecté. Pendant qu'André rode les soupapes, Hugo et Cyrrhus remontent la roue arrière droite et la jante avant droite. Voilà le beau Farmall enfin bien campé sur ses aplombs. Le volant est enlevé en vue d'un soigneux masticage, le fil de la mise à la masse de la dynamo ôté ainsi que la prise électrique arrière qui n'est pas d'origine. Le boîtier électrique est ouvert pour le vérifier, le flexible du vérin démonté.
La délicate phase de sondage peut commencer.
Le boulon du chassis à extraire n'est pas borgne. Il est percé à 8 , l'essai à l'extracteur est infructueux. Idem pour celui de la pipe d'échappement, encore un réfractaire! Les fameux ressorts des boulons de fixation du radiateur sont trouvés dans la niche du bloc du train avant. Ouf, c'est rassurant. Le boîtier de commande de l'arbre de la faucheuse est sec. Doit il recevoir de l'huile ou de la graisse?
Recherche des segments.
A tout hasard, la Boutique du Tracteur ne les aura-t-elle pas? Bien que non stipulés sur le catalogue 2018, la réponse tombe le vendredi 16 mars; nous les avons sous la référence 101203. Il faillit en tomber à la renverse ( de joie effrénée) le petit chevalier de la IH. Ils sont commandés le 19.
Mardi 20 mars, volet ou bas volet?
Le temps est froid et neigeux, autant rester au garage, le travail ne manque pas. Il y a ce volet de la pipe d'échappement, le volet réchauffeur. Il faut absolument le dégripper sous peine d'acheter une pipe neuve aux USA. Il est vraiment bloqué, des croûtes de rouille et autres matières encombrent la cavité et ont fait des concrétions. Une solution apparaît comme évidente ; avec un bout de lame de scie à métaux gratter de chaque côté de la paroi, dégripper, tenter avec la clé à molette de peser très prudemment sur la partie extérieure coudée de l'axe, donner quelques coups de jais sur le côté droit. Enfin miracle vers 12h 15, des bulles de dégrippant apparaissent à l'intérieur ; la voie est faite, le volet tremble, bouge et le va et vient s'effectue.
Ne faudrait-il pas le faire recharger sur sa face avant pour assurer une meilleure étanchéité des gaz d'échappement? Il faut le démonter, percer la petite vis de serrage de l'axe complètement corrodée. Au bout de quelques manipulations et injection de “Ventoline” le volet tourne sur son axe qui est extrait facilement. Extraordinaire étape. Le pétrolier va être retapé dans sa configuration d'origine totale.
Pour clore cette journée, pourquoi ne pas ouvrir le vérin qui est si mignon? Il se déboîte très facilement, l'intérieur est très propre (il y avait encore de l'huile lors de sa dépose le 25 février) ; il ressemble à une seringue à huile.
Quel sera le prochain volet se demandaient les artificiers de la IH ? Peut-être faudra- t- il équiper cet engin d'un bas volet, en tout cas la réussite du déblocage du volet du réchauffeur n'aura pas été volée et a été gagnée à la volée !