La sortie du 30 -ème bataillon des tracteurs d'Autrefois le Couserans,
Dimanche 7 août 2022, tentative d'évasion du Richier.
L'énorme rouleau compresseur qui avait appartenu jadis à l'entreprise de travaux publics Malet avait fini ses jours à Antichan. Complètement abandonné il s'enlisait peu à peu et semblait voué à la disparition. Rémy, le célèbre carrossier en avait eu le béguin. Il l'avait acquis pour une poignée de dollars, l'avait remis en route avec l'aide du professeur André et avec une très grande prudence ils l'avaient redescendu à Lorp. Remotorisé avec un moteur Cérès (moteur d'origine Baudoin) , il se préparait à une nouvelle vie. Rémy parti trop tôt, le rouleau s'ennuyait à nouveau à Lorp. C'est alors que Paul l'a acquis et amené au dépôt d'Autrefois le Couserans à l'usine de Lorp. Sauvé, s'était dit le Richier, j'ai été définitivement extirpé de l'oubli. Le premier président de l'association, Claude, avait dit à Paul; il faut le faire défiler cet engin. Hum, hum, ce n'est pas une mince affaire, il pèse dans les 14 tonnes et il demande quelque révision. Pourtant en 2021, c'est chose faite, le rouleau défile et mené de main de maître par Rémy Frayre spécialiste de la conduite de ces outils peu ordinaires. Tout s'est bien passé, sauf que tout à fait en dernière position l'énorme engin a eu l'outrecuidance d'aplatir plus que de raison les bouses de vaches et les crottins de cheval ce qui a donné un peu plus de travail à la balayeuse de la ville pour nettoyer la chaussée.
Pour la trentième édition pas question de se passer de ses services bien entendu. Rémy est aux commandes et cette fois ci il remorque un beau compresseur Spiros orné à l'arrière du logo d'Eole, le dieu du vent. Le tout a été repeint en jaune TP comme il se doit.
A 7 heures, fidèle à la tradition l'immense cohorte des tracteurs s'élance à la conquête de Saint-Girons. Très vite le groupe se dissocie. A partir du Vierzon de Mathieu le peloton perd de vue ceux qui sont en tête. Entre Pourlande et l'usine de Lorp le cortège est impressionnant. L'atmosphère est un peu nimbée de fumée bleuâtre au dessus des tracteurs. En queue de convoi le petit Energic donne tout ce qu'il peut sur ses courtes pattes et le majestueux pachyderme jaune clôture le ban.
Rémy avait dit à Paul, je devrais peut-être éviter le rond- point (pris chaque année à contre sens pour la circonstance) et continuer le chemin pour sortir avant le pont de Saint-Lizier, cette côte je ne la sens pas trop.
-Oh quand même, suit la colonne, expérimenté comme tu es.
Le fameux “rampaillou” est en vue. La puissance du vaillant moteur Cérès a-t-elle été surestimée? Au dernier tronçon le régime diminue, le valeureux conducteur se dit que ma foi il va falloir changer de rapport avant d'arriver au bout. Notons que l'embrayage est manuel, les vitesses ne sont pas synchronisées, quant aux freins il y a mieux.
Paré à la manœuvre.
Voyons se dit l'intrépide chauffeur, je dois débrayer et changer très vite de rapport pour repartir derechef. Hélas, c'était sans compter sur la forte attraction terrestre car sitôt débrayé l'énorme mastodonte commence à reculer, n'eut été le sang froid de l'adroit conducteur la situation eut pu devenir très critique. La maison de l'ambulancier tout à côté aurait pu craindre le pire! En fait c'est Eole qui a sauvé le convoi de la déroute. Avec un aplomb de circonstance, Rémy recule doucement sa locomotive et prend appui avec la roue arrière sur le timon du compresseur qui voyant le danger imminent s'arc boute, fléchit un peu mais résiste héroïquement. L'attelage stoppe, la première peut être enclanchée et tel le sous marin qui surgit des flots après avoir vidé ses ballasts, refait surface en haut du rond point.Un spectateur en admiration devant ce panel de véhicules se disait que si le timonier du Titanic avait aussi vite corrigé le cap en avril 1912 que cet homme sur ce rouleau, le paquebot aurait évité l'iceberg meurtier qui aurait aussitôt fondu enragé d'avoir raté son coup!
Comme si de rien n'était le cortège reprend son allure de petite croisière jusqu'au boulevard Frédéric Arnaud atteint à 8h10. Beaucoup disaient, c'est curieux cette impression, on dirait que la départementale 117 et les grands boulevards de Saint-Girons sont beaucoup plus lisses qu'avant.
Pardi, le grand Richier est passé par là, que voulez- vous, Autrefois le Couserans est devenue une association de poids avec des engins lourds!
Paulin Richier, le fondateur de Noralpe, lui, souriait aux anges.
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